La vérité sur l'Affaire Harry Quebert -Joël Dicker (2e avis)

Août 1975. Dans la petite ville d'Aurora, Nola Kellergan, âgée de 15 ans, disparaît. Trente-trois ans plus tard, son corps est découvert dans le jardin d'un écrivain célèbre. Tout l'accuse, surtout quand la relation de l'écrivain, trentenaire à l'époque, et de l'adolescente est mise au jour. Mais Markus Goldman, un ancien élève de Quebert, qui cherche un sujet d'inspiration pour son second livre, est convaincu de l'innocence de son mentor.

Il est rare que je me fende d'une chronique quand je lis un roman que l'Homme a déjà lu avant moi. Pourtant, cette fois, j'ai eu bien envie de refaire un point sur ce roman, notamment parce que nous n'avons pour le coup pas vraiment le même sentiment en refermant ce pavé, mais aussi parce que la première chronique remonte à 2013... Et en 7 ans, on peut changer...

Ce qui n'a pas changé, c'est la puissance narrative et scénaristique de ce roman. L'Homme le disait, et à juste titre, on est embarqué dans un thriller qui ne dit pas son nom. L'intrigue globale fonctionne bien, Joël Dicker sait nous emmener sur des pistes qu'on pense évidentes mais qui se révèlent peu à peu fausses... Ce roman, c'est un grand puzzle dont on assemble les pièces peu à peu sans avoir la moindre idée de la dernière pièce, et j'avoue que même moi j'ai été bluffée sur ce point.

En revanche, tout au long de ma lecture, j'ai été très mal à l'aise. Rapidement, j'ai compris que j'étais gênée par cette histoire présentée comme une histoire d'amour entre une ado et un mec de 20 ans son aîné. Et sans que cela ne dérange grand monde au final... On lit par ci par là quelques remarques mais Joël Dicker fait de cette histoire d'amour un point central et la fait énormément reposer sur Nola... Bah oui, voyez-vous, ce pauvre Harry sait que c'est pas bien, mais ce n'est tout de même pas sa faute si Nola revient vers lui et qu'il ne la repousse pas, qu'il ne cadre pas les choses et finit même par l'emmener en vacances dans un hôtel !

Au fil des pages, je me suis rendue compte que je n'aurai probablement pas eu ce regard critique il y a 7 ou 8 ans, lors de sa sortie. Pourtant, aujourd'hui, à l'aune de tous les débats de société sur les rapports entre les hommes et les femmes, cette critique m'a semblée évidente... Et puis, peu à peu, je me suis rendue compte que les femmes dans l'ensemble dans ce roman avaient finalement de sacrés mauvais rôles : caricaturales, elles passent pour des hystériques, des nymphomanes, des harceleuses et j'en passe...

Sans que je remette en cause la qualité narrative de ce roman, je dois dire que ma lecture m'a amenée à me questionner sur le regard que je porte sur mes lectures. Il est possible que les récents débats de société et mon sentiment féministe grimpant aient contribués à ce sentiment. Est-ce un mal ? Je ne pense pas : l'esprit critique a encore de beaux jours devant lui !

Texte © Miss Alfie 2020.
Couverture : La vérité sur l'affaire Harry Québert, Joël Dicker, éditions De Fallois, collection Poche, 2014, 864 pages.