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Miss Alfie, croqueuse de livres... & Compagnie !
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14 septembre 2012

La horde du contrevent - Alain Damasio

Aujourd'hui, c'est Clément qui vous propose une chronique !

La horde du contreventRésumé :

Il y a du vent, dis donc.

 

Critique:

Après quelques critiques acerbes de romans que je n'ai pas aimés, je pense qu'il convient de rétablir l'équilibre avec un roman que j'ai aimé. Je l'annonce d'emblée, c'est tout de même beaucoup moins amusant à lire (et à écrire aussi) qu'une critique de roman que l'on déteste...

Je ne vais pas parler de l'auteur, pour lequel je n'ai rien de bien mieux à dire que sa page Wikipedia. Ce qui fait peu.

Parlons plutôt bouquin, et, donc, en l'occurence de la Horde du contrevent. Ce roman est assez difficile à ranger dans une catégorie. Disons, que c'est de la Science Fiction Fantasy Mystico-poétique.

Non mais reviens...

Il faut ranger les orques, les trolls et les elfes des bois dans une boite, ce n'est pas le sujet ici. Mais La Horde se déroule effectivement dans un monde purement imaginaire, passablement médiéval (même si rien ne permet véritablement de situer un véritable niveau de technologie), donc bon "Fantasy", ça colle environ bien.

Le monde ici est simple à en pleurer : une sorte de bande de terre, de quelques milliers de kilomètres, bordée de lisses et hautes parois de glace, et un vent à décorner les boeufs (les bons jours). Tout le temps. Dans ce riche paysage, une "horde" a pour mission de remonter la bande depuis sa base (Abeerlaas, nichée au pied d'une vertigineuse falaise) pour aller découvrir la source du vent. A pieds.

On ne fait guère plus simple comme pitch, et c'est tant mieux.

Parce que les "oeuvres" de Science fiction (et/ou de Fantasy) qui s'étiolent sur plusieurs milliers de pages, en en mettant 400 à commencer à attaquer le sujet, tout en prenant un malin plaisir à "sélectionner" le lectorat, ça va 5 minutes (mais ça j'y reviendrai).

Dans "La horde", il suffit de lire la 4e de couv' pour comprendre assez vite dans quel univers on atterrit. Certes, il faut (comme toujours) une petite centaine de pages pour identifier les rudiments de l'univers que l'on nous décrit, mais c'est le principe même de la description d'un monde, d'un univers, d'une culture et d'un mode de vie totalement imaginaire. Mais ici ça se passe plutôt bien, on plonge avec délice dans ce monde où le vent est l'élément central, avec son propre langage, ses différentes formes. Le monde de nos héros tourne complètement autour de leur "dieu" vent qui englobe tout, crée et détruit tout. Alain Damasio n'imagine pas ici une simple "religion" du vent, il crée une mystique complète autour du mouvement (d'air le plus souvent, certes), une autre vision de la vie en vérité, et c'est là tout l'intérêt du roman.

La horde, donc, est composée de vingt trois membres, chacun avec son rôle, son expertise pour la survie de tous. Ce point a son importance puisque le roman est écrit par chacun des personnages, chacun devenant à tour de rôle le narrateur. Le système pour s'y retrouver est simple : un petit signe de ponctuation/symbole pour chacun, positionné au début du passage que le personnage raconte. (A ce jeu, ne lisez pas ce roman sur une liseuse électronique, sous peine de devoir revenir au début toutes les une ou deux pages – au moins le temps d'identifier les 4-5 narrateurs réguliers-).

C'est un petit exercice de style auquel se soumet ici l'auteur, puisque le style de narration change d'un personnage à l'autre. Ça permet vaguement de creuser les motivations et pensées de chacun. C'est amusant, passablement maîtrise, un poil trop ostentatoire à mon goût, mais ça passe.

Ce n'est pas sur ce style de narration que l'on trouve la vraie faiblesse de ce roman. Moi, je la trouve sur deux choses plus simples :

  • une histoire qui se déroule sur plusieurs dizaines d'années, contée autour des épisodes les plus marquants de l'odyssée même lorsque ceux-ci ne durent que quelques jours. De fait, l'histoire se construit à grands coups d'ellipses temporelles, et c'est passablement surprenant à certains moments. Certes écrire "Bon et puis là ils marchèrent tous les jours pendant 6 ans avec le vent dans la gueule" cinq ou six fois dans le roman, ça le fait pas. J'ai juste le sentiment que certaines ellipses tombaient un peu à plat, à des moments où on attendait la suite ou au moins une transition...

  • une fin annoncée en gros à la moitié du roman, un dénouement somme toute prévisible.

Pourtant, le roman marche très bien. Déjà parce que si les "Quoi ?" et "pourquoi?" sont un peu inutiles, c'est bien parce que le "Comment ?" du roman est parfaitement maîtrise, et qu'il tient en haleine à plusieurs reprises. On suit des aventures avec plaisir. Tout d'abord d'un strict point de vue factuel, puis de plus en plus psychologique, introspectif, mystique et surnaturel. Au final, le lecteur a voyagé, peut être aussi loin que les protagonistes, a vibré, découvert un univers complet, cohérent et poétique.

Alain Damasio nous emmène dans son monde de vent, y tisse sa toile de croyances, de foi, de culture, et l'on en ressort avec le sentiment diffus d'y avoir enrichi notre propre vision du monde d'une mystique nouvelle. Est-ce que l'on peut décemment espérer mieux que cela ?

Texte © Clément 2012.
Édition présentée : La horde du contrevent, Alain Damasio, Éditions Gallimard, Collection Folio SF, 2007, 700 pages.

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Commentaires
C
C'est une mission très délicate que de critiquer ce roman. Surtout parce qu'entrer un peu dans sa mystique reviendrait à en pervertir la découverte...<br /> <br /> <br /> <br /> En revanche, cette fin en 2 étapes, elle me semblait évidente. Remarquez, avoir un dénouement logique (même prévisible) est probablement mieux que se retrouver face à un "deus ex machina" complètement débile...<br /> <br /> <br /> <br /> Si en outre, la fin a pu en surprendre certain(e)s, alors la principale faiblesse du roman pourrait être gommée.
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B
Lecture prévue depuis un bout de temps, il faut juste que je me décide à plonger (en prenant le temps qu'il faut pour poser mes repères dans ce texte, ce n'est pas instantané, je pense).
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K
Un excellent souvenir de lecture et un des rares livres que j'espère relire.<br /> <br /> Bon résumé :D
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R
Moi on m'avait raconté la fin avant que j'entame ma lecture, mais finalement ça ne m'a pas vraiment gênée, c'est un excellent roman !
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L
J'ai dévoré ce roman ! Mais je n'avais pas pressenti la fin avant la fin.
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