Le Choeur des femmes - Martin Winckler
Pour valider son internat, Jean Atwood doit effectuer six mois de stage à l'unité 77, un service de planification et d'IVG, bien loin de son rêve de chirurgie. Dans un univers où la parole de la femme prime avant l'acte, Jean va se trouver face à un monde à mille lieux de son rêve de médecin.
Lorsque j'ai vu à quelle vitesse mon Mec avait englouti La maladie de Sachs, je me suis dit qu'il fallait vraiment que je découvre Martin Winckler. Sur les conseils de ma libraire (toujours elle, oui oui !), j'ai opté pour Le choeur des femmes, sorti l'année où Martin Winckler a quitté la France pour le Canada. Bon, heureusement ceci dit que mon homme m'avait lu quelques passages du premier livre, je n'ai donc pas été surprise par un style narratif particulier, fait de longues phrases entrecoupées de réflexions en tout genre, et de chapitres qui alternent entre le récit de Jean et des témoignages, des poèmes, des réflexions diverses et variées sur le sujet qui nous intéresse...
Passée cette première surprise du style de l'écrivain, je vous le dis tout net, j'ai eu un mal de chien à me sortir de cette histoire. Si vous lisez bien tout cet article, y compris les lignes en bas en tout petit que souvent on évite, vous vous rendrez compte que ce bouquin se rapproche dangereusement des sept cents pages. Un pavé, diront certains. Un condensé d'émotion, leur répondrais-je. Car à travers l'histoire de Jean, c'est toute une réflexion sur le système médical, sur la formation des médecins en France que Martin Wincker amène. Il nous parle d'un service qui survit grâce à la conviction et au militantisme de ses membres, qui reçoit celles et ceux dont on ne veut pas ailleurs, qui porte un regard humain dans une société extrêmement bien-pensante et jugeante.
Ce livre m'a profondément touché en tant que femme, forcément, car il parle des femmes, il parle de nous, de nos problèmes, de nos angoisses, de toutes ces choses qui sont loin d'être mécaniques et qui parfois nous enquiquinent la vie. Est-ce un livre qui parlerait à un homme ? Sûrement, si l'homme en question est prêt à mieux comprendre qui nous pouvons être, comment nous pouvons fonctionner, et ce, sans caricature aucune, sans jugement. Mais c'est aussi un livre qui fait la part belle à une médecine plus humaine, plus respectueuse du patient, de ses choix, de ses désirs, une médecine à l'écoute de sa souffrance, qu'elle soit physique ou psychique, une médecine destinée à soulager, à réduire cette souffrance. Une médecine que l'on ne rencontre hélas pas dans tous les services et chez tous les praticiens.
A travers l'évolution de Jean Atwood, jeune interne, bientôt médecin, on découvre un univers médical barricadé derrière sa technique et ses connaissances, qui n'ose pas laisser la porte ouverte à la parole, au doute, à l'interrogation, et parfois tout simplement au respect de l'autre. Avec Le Choeur des femmes, Martin Winckler offre à toute personne qui pourrait oeuvrer dans l'univers du soin la partition d'une déontologie et d'un code de conduite dont beaucoup de praticiens pourraient s'inspirer.
Pour prolonger la réflexion, vous pouvez visiter le site web de Martin Winckler, riche d'enseignements et sur lequel j'ai moi même découvert un paquet d'informations plus qu'intéressantes sur des sujets que l'on pense connaître...
Roman lu pour le Challenge Petit Bac organisé par Enna, catégorie "Sport/Loisirs".
Texte © Miss Alfie 2011.
Édition lue : Le Choeur des femmes, Martin Winckler, éditions Gallimard, collection Folio, 2011, 672 pages.