Jeu blanc - Richard Wagamese
Saul est un indien Ojibwés. Il grandit dans sa famille, dans la nature, fuyant l'Homme blanc, jusqu'au jour où le destin et la civilisation blanche le rattrapent avec la mort de sa grand-mère. Saul est alors placé dans un pensionnat catholique où il va découvrir le hockey sur glace. Son talent avec des patins et un palet le mettent vite en lumière, mais dans un Canada raciste en plein coeur des années 70, Saul devra se perdre pour comprendre son histoire.
L'an dernier, j'avais découvert Les étoiles s'éteignent à l'aube, le roman qui fit connaître au public français Richard Wagamese. Après ce succès, son éditeur en français a fait traduire ce roman publié en 2012 au Canada. Avec la même force que dans le précédent, Richard Wagamese explore l'histoire des Indiens canadiens et le racisme d'un pays qui, vu de France, paraît tellement inclusif et formidable...
Mais comme dans toutes les belles histoires il y a des esprits malins qui viennent noircir le tableau, dans Jeu blanc la vie en contact avec la nature de Saul ne pouvait se poursuivre... On comprend rapidement que des rafles ont lieu dans les secteurs où vivent les Indiens pour scolariser de force les enfants et les convertir au catholicisme. On tente de gommer en eux toute leur culture ancestrale, les rites et traditions. Ils doivent rentrer dans le moule de l'Homme blanc... Mais pas trop non plus... Car le jour où Saul découvre le hockey, le sport des Blancs, il découvre que malgré tout le talent qu'il peut avoir, il restera un Indien qui ne peut jouer dans les plus grands clubs...
"Ensuite, dans les années soixante, nous nous enfonçâmes das le coeur sombre du nord de l'Ontario et nous fûmes haïs. Haïs. Il n'y a pas d'autre mot. Les Moose, une équipe sortie de la forêt, voulait prouver son talent dans les meilleures compétitions qui soient. Nous arrivâmes dans ces villes en hockeyeurs espérant disputer un match honnête, crosse à crosse, de bout en bout, juste et équitable. Mais ils ne nous virent jamais autrement que comme des Indiens. Ils ne virent jamais rien d'autre que des visages à la peau mate alors qu'ils auraient dû être blancs. Nous n'étions pas bienvenus parmi eux Et quand nous gagnions, les choses devenaient pires." (p. 157)
Ce roman est puissant, il vous soulève, vous embarque, jusqu'à sa fin qui m'a scotchée, qui m'a laissée au bord de la patinoire stupéfaite. Je n'y avais pas trop pensé, je voyais Saul comme quelqu'un de détaché, et puis cette lame de fond qui arrive... Je n'en dis pas plus, je vous laisse plonger dans ce roman de Richard Wagamese, un vrai grand écrivain canadien devant l'éternel.
Texte © Miss Alfie 2021.
Couverture : Jeu blanc, Richard Wagamese, traduit de l'anglais (Canada) par Christine Raguet, éditions 10/18, 2019, 264 pages.