Amok ou le fou de Malaisie - Stefan Zweig
Sur un bateau revenant des Indes, le narrateur rencontre un homme en pleine nuit. Le temps d'une confession nocturne, le narrateur découvre la solitude et la détresse d'un médecin.
Cela faisait longtemps que je ne m'étais pas plongée dans une nouvelle de Zweig, trop longtemps. Je poursuis donc mon exploration de son oeuvre, méthodiquement, par la quatrième nouvelle présentée dans l'intégrale des éditions Livre de Poche. L'avantage de lire ces oeuvres dans le cadre d'une intégrale, c'est que je fais fi des éventuelles libertés prises par les éditeurs français pour compiler les recueils par rapport aux éditions originales.
Ainsi, Amok a été publié pour la première fois en 1922 avec quatre autres nouvelles : La Femme et le Paysage, La Nuit fantastique, Lettre d'une inconnue et La Ruelle au clair de lune. En revanche, la première édition française de 1927 n'a repris que Lettre d'une inconnue de ce recueil initial, y ajoutant une autre nouvelle, Les yeux du frère éternel. Autant dire que la logique suivi pour la composition du recueil en allemand n'était plus de mise en français !
Mais qu'importe. Parlons plutôt de cette nouvelle qui démontre une nouvelle fois le talent de Zweig pour raconter des émotions. Dans cette nouvelle, Zweig utilise une fois de plus son habituel récit enchâssé : un passager d'un navire revenant des Indes (le narrateur) va recueillir la confession d'un médecin. Cette technique offre à l'écrivain la possibilité de raconter deux histories en une, deux trames qui sont forcément liée par ce double récit.
Comme souvent, c'est dans le récit enchâssé que se trouve l'intensité la plus importante de l'histoire de Zweig, dans cette partie qu'il peut mettre en avant sa capacité à décrire l'âme humaine, ses tourments et ses émotions. Zweig me semble, pour l'instant, l'écrivain qui sait le mieux mettre en mot la passion, qu'elle soit amoureuse, folie ou haine. Et l'amok en semble l'incarnation totale :
"C'est plus que de l'ivresse... C'est de la folie, une sorte de rage humaine... Une crise de monomanie meurtrière et insensée, à laquelle aucune intoxication alcoolique ne peut se comparer." (p. 227)
En une cinquante de pages, Zweig m'a embarquée une fois encore dans un tourbillon puissant et percutant. Certes, je ne suis peut-être pas objective, mais quand même : quel talent !!!
Une lecture qui s'inscrit dans le cadre du challenge "Sur les traces de Stefan Zweig" et du challenge "Un classique par mois" de Pr. Platypus.
Texte © Miss Alfie 2017.
Couverture : Romans et nouvelles, tome I, Stefan Zweig, édition établie, présentée et annotée par Brigitte Vergne-Cain et Gérard Rudent, Éditions Le livre de poche, collection La pochotèque, 2001, 1191 pages (Amok ou le fou de Malaisie, traduit par Alzir Hella et Olivier Bournac, pages 199 à 250).