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Miss Alfie, croqueuse de livres... & Compagnie !
30 septembre 2013

Courir sur la faille - Naomi Benaron

courir failleJean-Patrick est un jeune garçon qui se découvre une passion pour la course à pied lorsqu'un marathonien vient dans sa classe parler de son sport. Quelques années plus tard, il entre à l'université, espérant réaliser son rêve : représenter le Rwanda aux jeux olympiques de 1996. Mais dans les années 90, il ne fait pas bon être Tutsi sous un gouvernement Utu...

En 1994, j'avais 11 ans. Les plus perspicaces profiteront de cette information pour déceler mon âge canonique. Les autres comprendront qu'à 11 ans, on a bien d'autres préoccupations que de s'inquiéter de la politique internationale et du génocide qui décima en quelques semaines les Tutsis rwandais. Courir sur la faille remet en lumière un pan de l'Histoire mondiale sans doutepeut-être moins connu que d'autres mais tout aussi tragique.

Le roman débute en 1984. On y rencontre Jean-Patrick et sa famille, Tutsis. Rapidement, on comprend que les tensions qui ont connu leur apogée au printemps 1994 trouvent leur origine dans une Histoire plus ancienne. Un petit tour sur Wikipédia, et le lecteur apprendra bien vite que la distinction entre Hutu et Tutsi est à porter au crédit des colonisateurs belges qui décidèrent de classifier des peuples qui vivaient auparavant à peu près en harmonie, créant ainsi une hiérarchie entre les riches Tutsis minoritaires et les pauvres Hutus majoritaires. Comme toute situation d'inégalités, un jour, la majorité se révolta, jusqu'à l'indiscible.

Naomi Benaron nous offre donc l'histoire d'un jeune homme qui devra accepter de se faire passer pour celui qu'il n'est pas, parce qu'un Hutu a plus de chances d'aller loin avec l'appui des politiques... A moins que son identité Tutsie ne permette à ces mêmes politiques de déjouer les rumeurs malveillantes lorsqu'elles commenceront à courir... On découvre des vies d'hommes et de femmes soumis à la peur parce qu'ils sont nés dans une famille plutôt que dans une autre, des esprits étroits qui retourneront bien vite leur veste le jour où il faudra choisir son camp, et quelques personnalités qui oseront... On apprend aussi, pour ceux qui ne le savait pas, l'aveuglement des Européens et des Américains qui, bien qu'ayant envoyé des forces militaires, s'empresseront de sauver leurs ressortissants avant d'empêcher les tueurs à la machette d'égorger des populations entières lorsqu'elles saisiront ce qui se joue dans le pays.

"Il était évident que les agences de renseignement américaines ne comprenaient rien. Même Jonathan, après ce dont il avait été témoin à Kigali, ne comprenait pas. La réalité du Rwanda demeurait soigneusement dissimulée aux étrangers pour qu'ils continuent à flotter sur les eaux paisibles qu'on faisait apparaître à leur attention comme par magie au-dessus de la mer agitée dans laquelle se débattaient les Rwandais." (p.246)

Au milieu de toute cette haine que l'on sent monter, Jean-Patrick découvrira l'amour. Et oui, un bon bouquin américain qui se respecte, qui parle de course à pied, ne peut s'empêcher d'introduire une belle au milieu de tout ce sang qui coulera ! Mais on pardonnera bien vite à Naomi Benaron ce côté à peine trop cliché tant ses personnages restent riches et attachants. La dureté des passages concernant le génocide sera un peu apaisée par cette histoire, un peu de douceur dans ce monde de brutes... Et pour ceux qui craindraient la partie relative au génocide, sachez qu'elle n'occupe qu'un petit espace du roman, Nami Benaron nous relatant bien évidemment des choses terribles comme les annonces diffusées à la radio nationale avec les noms et les adresses des personnes à abattre, mais prenant surtout le temps de planter le contexte autour de l'histoire de Jean-Patrick.

Au final, voilà typiquement le genre de bouquin que j'aime : l'occasion de voyager, de redécouvrir l'Histoire de l'humanité, même ses faces sombres, d'approcher une culture, le tout fort agréablement. Bref, l'un de mes coups de coeur de l'année je crois !

 Mes remerciements aux éditions 10/18 pour cette formidable lecture !

Ce qu'on en dit ailleurs :

  • La cause littéraire : "Ce livre, en urgence… pour eux tous, pour nous tous."
  • Sur la route de Jostein : "C'est avec beaucoup de chaleur humaine que le rêve personnel d'un jeune garçon ambitieux nous emmène aux plus rudes moments d'un peuple déchiré au sein, pourtant, d'une si belle région dominée par le lac Kivu."

Texte © Miss Alfie 2013.
Édition présentée : Courir sur la faille, Naomi Benaron, traduit de l'anglais (américain) par Pascale Haas, Éditions 10/18, Collection Grand format, 2013, 164 pages.

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Commentaires
M
Je sens que je vais finir par craquer mais je vais quand même attendre la sortie en poche.
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L
J'entends tellement d'avis positifs que je me méfie un peu... :s
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A
J'aime bien quand la littérature sert éclairer de façon différente certaine info passée de mode.
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C
Encore un avis postif !
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E
Je suis en train de le lire j'en suis à la moitié et j'aime beaucoup!<br /> <br /> Je te trouve bien critique sur le fait qu'il rencontre l'amour, mais je trouve justement que ça montre bien que même en pleine crise les gens continuent de vivre et de ressentir des sentiments, humains. Ils subissent beaucoup de choses terribles mais vivent aussi. J'apprends beaucoup de choses aussi car j'avais beau avoir 21 ans (hum hum...âge canonique ;-) je suis passée à côté de beaucoup d'informations internationales...
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