ile invisibleMargarita, une île des petites Caraïbes rattachée au Venezuela. C'est sur l'une de ses plage que Wolfgang Kreutzer a trouvé la mort quelques semaines auparavant. Insatisfaite de l'explication que les autorités lui ont fourni, sa mère, Edeltraud, décide de faire le voyage depuis l'Allemagne pour comprendre comment son fils unique a pu trouver la mort en se noyant, lui qui nageait si bien. Pour découvrir l'envers du décor d'une île à touriste, elle devra compter sur José Alberto Benitez, un avocat.

Asphalte éditions, je les connaissais pour leur collection de recueils de nouvelles noires autour des villes du monde. L'opération de Libfly m'a permis de découvrir qu'ils ont également une collection de fictions à la fois noires et culturelles. En tout cas, c'est ainsi que je définirai L'île invisible. Ce roman nous entraîne sur une petite île dont je n'avais, je l'avoue, jamais entendu parler, mais que son auteur connaît très bien puisqu'il y est né. Ancien avocat, Francisco Suniaga a publié ce titre qui était son premier roman en 2005, et ce premier succès l'a incité à poursuivre les aventures de José Alberto Benitez.

Dans ce premier roman, en accompagnant cette femme en quête de la compréhension indispensable au deuil, nous découvrons une vie, une culture, totalement à l'opposé de notre mode de vie européen. Le contraste est d'autant plus flagrant que Suniaga confronte un peuple vivant en fonction de ses envie, sans contrainte de temps, de cadre, de règles, à une femme et quelques compatriotes d'origine allemande, à peine trop caricaturés sur leur rigueur et leur respect du cadre. L'enquête sur la disparition de Wolfgang apparaît comme un simple prétexte pour lever le voile sur l'envers du décor, pour nous embarquer dans les ruelles loin des hôtels à touristes, et notamment dans les gallodromes où s'affrontent des coqs de combat.

Pour nous conter cette histoire, Suniaga nous fait passer de l'un à l'autre des personnages, n'hésitant parfois pas à intégrer des chapitres qui sont de simples monologues de l'un des protagonistes. Il ne faut pas chercher un rythme soutenu, l'enquête étant régulièrement rompue par les rencontres de Benitez avec l'un de ses amis, rencontres dont, je l'avoue, j'ai eu du mal à saisir l'intérêt : les deux hommes tentent de décortiquer un rêve de l'avocat, mais en dehors de nous parler des bienfaits de la littérature et de la culture, aucun réel rapport avec notre histoire de base... A ce petit bémol, s'ajoute un regret : celui de ne pas avoir eu assez d'éléments sur l'hitoire de cette île. Néanmoins, le tout est compensé par une plume fort agréable et parfois même poétique, nous amenant indirectement à une réflexion sur le temps et sur le monde...

Un premier roman qui laisse supposer un réel talent de l'auteur, et une intrigue qui, si elle ne révolutionne pas le genre noir, nous entraine bien au delà d'une simple mort par noyade...

"Elle ignorait et ignorerait que la réalité de l'île était un prisme qui décomposait à sa guise la lumière et les couleurs, sans modèle pré-établi, et que même la lumière divine n'échappait pas à ces distorsions."

Une lecture en partenariat avec Libfly !

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Texte © Miss Alfie 2013.
Édition présentée : L'île invisible, Francisco Suniaga, traduit de l'espagnol (Venezuela) par Marta Martinez Valls, Éditions Asphalte, Collection Fictions, 2013, 256 pages.